FLO et Cigey Design racontent le clip-vidéo de "Work It"
Pour finir cette première saison de “Focus Clip-Vidéo”, j’ai contacté deux chanteuses dont les plus récents singles représentent la vibe que je veux avoir en 2021. On commence avec l’esprit festif et libre de “Work It” de FLO. Active depuis une quinzaine d’années sur la scène hip-hop kréyòl, cette rappeuse guadeloupéenne vit entre Miami et la Guadeloupe. Après divers singles et mixtapes, c’est en 2018 qu’elle dévoile son tout premier album studio : “A Long Time Coming”. La vidéo promotionnelle de “Work It” a été réalisée par Cigey Design qui, en l’espace de dix ans, est devenu une référence dans l’industrie caribéenne du clip-vidéo. Son style repose sur une cinématographie haute en couleurs mettant en avant la beauté naturelle de la Guadeloupe. FLO et son réalisateur nous emmènent dans les coulisses de ce clip-vidéo.
Avant de parler clip-vidéo, commençons par revenir sur l’historique de “Work It”. Il s’agit du troisième extrait de votre premier album studio "A Long Time Coming". Pourquoi l'avoir choisi comme titre promotionnel ?
FLO : “Work it” est un titre composé par Staniski, qu’on ne présente plus, le hitmaker des Antilles ! Je lui avais passé commande d’un titre un peu électro afrobeat avec sa touche Caribbean, une sonorité world qui pourrait plaire au plus grand nombre, c’est comme ça qu’on arrive à “Work it” que j’écris dans 3 langues (anglais créole et français), exercice parfois risqué mais dans le but de parler un peu à chacun de mes marchés d’intérêt, dans une ambiance dancefloor un peu envoutante.
Le single a retenu l'attention en Corée du Sud puisque le studio Viva Dance a proposé des chorégraphies dessus. Avez-vous mené une stratégie particulière pour cela ?
FLO : Effectivement, par un contact sur Miami, le titre a été proposé á Sound Republica, une boite de distribution et d’édition en Corée. Le titre leur a plu et, en partenariat avec un des plus gros studios de danse là-bas, une chorégraphie est née pour booster un peu la promo sur ce marché. Tout l’album est distribué par Sound Republica, donc c’était vraiment un choix spontané de Hazel du Viva Dance Studio de danser dessus. Cette vidéo a 70K vues, plus que le son lui -même (rires).
C'est un titre fait pour danser en soirée. Pourtant, le clip-vidéo est exclusivement en extérieur. Pouvez-vous nous raconter le processus de pré-production du clip-vidéo ?
FLO : C’est un titre pour danser tout court. En soirée, en famille, pour les danseurs, pour les enfants, une après-midi récréative (rires). Je voulais juste qu’une belle énergie s’en dégage, quelque chose de fun et un peu différent des titres plus introspectifs de l’album. Ce sont les enfants qui aiment le plus ce morceau et qui refont la choré ! Et Up! Up! Up! (rires) J’ai choisi de faire ce clip avec mon acolyte Cigey avec lequel j’ai déjà fait pas mal de clips. Cela s’est fait naturellement.
Cigey : J’avais déjà entendu la maquette de ce son bien avant sa sortie et j’avait dit à FLO :“je clippe celui lá”.
FLO : Et moi, je n’ai pas voulu le contrarier (rires). Quand un réalisateur apprécie la musique c’est toujours plus fluide, il prend encore plus son pied. A part le deuxième couplet en créole où il y a une volonté d’aller vers un visuel plus type scénario, en mode girl power, le reste du visuel a vraiment plus été pensé en terme d’énergie, d’esthétique colorée et bien contrastée avec un focus sur la danse. C’est au chorégraphe Nelson Rogier de l’association de danse Djòk auquel j’ai fait appel. Il a créé toute la chorégraphie. Un des danseurs, Ludovic Bibeyron, a aussi participé au stylisme des danseurs.
A part l'apparition furtive du mot hôtel de ville ou d'une plaque d'immatriculation, il est difficile d'identifier le clip-vidéo comme étant en Guadeloupe mais il s'en dégage une vibe clairement caribéenne. Pourquoi le choix de ces lieux en particulier ?
FLO : Nous étions sur la commune de Deshaies en Guadeloupe. L’avantage de cette zone c’est qu’on peut profiter d’un centre ville un peu typique des îles, avec un coté mer et montagne, et en bonus une marina. En terme de production sur le terrain c’est pratique de pouvoir avoir 4 décors totalement différents dans un rayon de quelques kilomètres et parfois quelques mètres !
Cigey : L'objectif était de dynamiser le clip un maximum et de respecter les codes qui reflètent la Caraïbe. Les contrastes sont intéressants aussi, entre des montagnes bien verdoyantes sur fond de bleu océan, des cases colorées avec une marina en background, une plage au sable doré, mais en même temps un sous-bois style mangrove pour y accéder…
Le hip-hop au féminin US des années 80-90 a montré la diversité d'images que les femmes pouvaient adopter. Il y a eu de la place pour une Queen Latifah, une Missy Elliott et une Lil' Kim ou Eve, par exemple. Après le vide du début des années 2000, Nicki Minaj a incarné un renouveau avec un hip-hop séduisant la scène pop mainstream et un visuel suggestif qu'on retrouve aussi avec Cardi B ou Megan The Stallion. Quelle importance donnez-vous à l'expression de votre féminité dans votre identité visuelle artistique en général ?
FLO : Je donne une importance à la représentation de la féminité dans mes visuels car justement il n’y a pas beaucoup de diversité dans ce qui est proposé en mainstream. Je peux apprécier les imageries de Nicki ou Cardi, mais j’aimerais bien aussi quelque chose d’autre comme quand il y avait EVE, DaBrat ou Lauryn Hill… une palette d’identités féminines à l’image de qui nous sommes. Parfois sexy, parfois vulnérables, parfois femmes fortes, parfois complètement délirantes ou tomboy… Il y a une sorte de fashion style qui va avec chaque facette. Donc en l’exprimant dans mes clips j’apporte ma touche de féminité au paysage visuel. Par exemple, le choix du maillot venait totalement de moi (rires). Sur ce clip, je n’avais pas vraiment de styliste, j’ai un peu tout fait à ma sauce avec N’afrikart Premier qui m’a fourni la veste en wax. La tenue avec la robe, c’était mon idée. Je demanderai toujours au réalisateur ce qu’il en pense. Souvent, ce sont des hommes donc leur retour est intéressant à avoir en terme de public.
"Work It" est un clip à chorégraphie. Comment s’est passée la mise en place de la chorégraphie ?
FLO : La troupe de Djòk dirigée par Nelson Rogier a fait un gros boulot en très peu de temps, BIG UP! Il m’a proposé les danseurs qu’il voyait bien sur le clip. On a d’abord travaillé à deux pour qu’on s’entende et fasse connaissance tout simplement. J’ai participé aux répétitions, et j’ai tenté de les suivre ! Ils ont apprécié que j’y participe, que j’essaie de faire plus en tant qu’artiste que de chanter devant eux qui dansent. J’ai un réel respect pour eux. C’était une belle expérience de rentrer un peu dans le monde des danseurs. Je ne suis pas vraiment une personne qui danse beaucoup. Je fais plutôt des petits one two step (rires) donc c’était un challenge et j’ai vraiment adoré. D’ailleurs, je prends désormais des cours de danse Gwo Ka avec l’association Djòk. On se défoule bien. Sortir de ma zone de confort est un peu ma tendance du moment dans les choses que j’entreprends.
Pouvez-nous nous raconter une anecdote de tournage ?
Cigey : Puisqu’on était sur le sujet de la danse, personnellement je dirais que c'est toujours intéressant d'avoir des danseurs qu'on fait répéter la chorégraphie 10 fois et puis de les voir s’épuiser à ne plus pouvoir (rires). Non mais plus sérieusement, ça ne se voit pas à l’écran, mais il pleuvait pas mal le jour du tournage.
FLO : Les fameuses montagnes de Deshaies sont parfois traîtres car elles se cachent derrière les nuages mais le vent a aussi du mal à les éloigner. Donc on jouait à cache-cache avec les nuages et le soleil et il y a eu beaucoup d’arrêts, mais il y avait une telle énergie avec tous les participants qu’on en rigolait bien.
Cigey : En général, quand les choses ne se déroulent pas comme tu veux, surtout question météo il ne faut pas bloquer la vibe et contrarier Mère nature. Il faut vraiment composer avec elle sinon ça empire !
Imaginez un.e enfant de 10 ans qui regarde ce clip en 2100. Quels commentaires espérez-vous l'entendre faire ?
Cigey : Tout dépend d'où il se situe. Si c'est un enfant qui est dans le froid, il aura envie de prendre des vacances. S’il est dans la Caraïbe, il aura envie de danser ou d'acheter une moto. Ou si ce sont des personnes plus averties, elles se diront que le concept est bon.
FLO : J’aimerais que ça donne toujours envie de danser, qu’il ou elle fasse des pas qu’on ne peut pas imaginer, peut-être qu’il y aura des petits appareils pour te faire rester en apesanteur, et vraiment Up!Up!Up!
L’interview touche à sa fin. Malgré la crise sanitaire, avez-vous des projets en cours ?
Cigey : En ce qui me concerne, vous pouvez streamer le clip-vidéo de “They Will Never Know”. On parlait de lui tout à l’heure, mais c’est une prod’ de Staninski et c’est une collaboration avec Saël et Oswald.
FLO : J’ai de nouveaux singles sur lesquels je travaille. On verra pour une sortie début 2021. Je travaille aussi l’aspect live de ce que je souhaite proposer sur scène, je m’entraine à un instrument mais j’en dirai plus quand je serai prête (il y a du boulot!). Sinon restez connecté sur mon site www.freemyflo.com et les réseaux sociaux @freemyflo sur Instagram, Twitter, YouTube et Facebook pour avoir les exclusivités.
Question bonus : pouvez-vous nous recommander un clip-vidéo qui selon vous reflète bien la Guadeloupe ?
Cigey : Il y en a trop pour n’en choisir qu’un seul (rires).
FLO : Moi je dirais Dominik Coco avec le titre “Gwada”. Prise d’assaut!!
Merci à FLO et à Cigey Design. Rendez-vous mercredi prochain pour mon focus sur “Work It”.
Photos : Xavier Dollin / Cigey Design