Stevy Mahy raconte le clip-vidéo de "Tout Ce Que Tu Es"
Sorti en 2019, le single “Tout Ce Que Tu Es” est le fruit d’une collaboration entre Stevy Mahy et LS. Un an après sa mise en ligne, le clip-vidéo a franchi la barre du million de vues sur Youtube. Ce voyage visuel dans le temps offre un autre regard sur l’amour dans une Guadeloupe an tan lontan dont on connaît peu d’images. Présente à la co-réalisation avec LS, Stevy Mahy a accepté de nous raconter ce clip-vidéo.
LS avait participé à votre spectacle "Renaissance Woman" et vous collaborez cette fois-ci sur un titre inédit.
Je savais que je voulais que nous collaborions sur un titre qui serait le fruit de cette rencontre artistique. Nous avions effectivement déjà travaillé sur mon spectacle donc nous avions déjà une vision commune.
Vous avez participé à la production et à la composition de ce single. Pouvez-vous nous expliquer le processus créatif ?
Mon processus créatif est resté le même si ce n’est que je devais penser à LS et l’intégrer dans celui-ci. Je pars de quelques notes, d’un riff de guitare et l’inspiration vient, j’écris le texte en même temps que la mélodie.
Vous avez toujours proposé une musique multiculturelle. Cette chanson est en français, en créole et en kikongo. Comment s'est fait le choix d'intégrer ces paroles et pourquoi avoir choisi de ne pas intégrer d'anglais ?
Mes choix de langue ne sont pas forcément réfléchis mais sentis, quand je reçois la mélodie en général je sais instantanément en quelle langue je vais la chanter. Sur cette chanson, c’est d’abord le français qui s’est imposé, puis, pour souligner l’intime, le créole pour moi et le kikongo pour LS.
Il est vrai que le clip-vidéo réussit à transmettre cette impression d’être au cœur de l’intimité d’un couple. Pouvez-vous expliquer le concept du clip-vidéo ?
LS et moi avons pensé le clip. Nous voulions partager l’idée de l’amour qui traverse le temps, les vies, les générations. L’amour qui unirait des flammes jumelles, des êtres qui se retrouveraient vies après vies. L’idée était de créer un contraste d’époque, de lieu mais toujours en toile de fond un sentiment fort. Donc nous avons voulu faire des scènes en studio, avec surtout des plans serrés pour souligner l’intime et en contraste des plans en Guadeloupe, en extérieur, la Guadeloupe de l’époque de nos parents.
J’ai adoré les séquences qui nous transportent dans les années 40/50. Pourquoi avoir choisi cette époque du passé et pas une autre ?
Parce qu’il y a quelque chose qui m’a toujours fasciné dans cette époque, une pudeur, une douce retenue. Un amour qui s’éclot lentement. Les années 70 évoquent autre chose pour moi : l’opposition, la révolution, la lutte pour la liberté.
Et pourquoi ne pas avoir proposé une continuité avec un saut dans le futur ?
Je voulais que cela soit le passé pour que l’on s’enracine dans quelque chose de fort, avant de se projeter dans l’après.
Après les romances de fin des années 90 et début des années 2000 aux Etats-Unis, l'industrie du film US semble s'intéresser de nouveau à la représentation du Black Love. En France, ce n'est pas du tout le cas, ce qui rend ce clip d'autant plus précieux en terme de représentation. Est-ce un aspect auquel vous avez été sensible dans les choix de mise en scène ?
Oui, il était important pour nous de « nous » représenter. L’image quoi qu’on en dise joue un rôle « politique» et quand on a la possibilité de maîtriser la narration, je pense qu’il ne faut pas hésiter, il faut que l’on raconte nos histoires, que l’on se dépeigne avec notre propre regard. Donc oui le black love de ce clip est intentionnel, même si j’avoue que cette notion me met mal à l’aise. Devons-nous vraiment démontrer notre humanité, prouver que nous aussi nous sommes dignes d’aimer et d’être aimé ? C’est dans ce sens que la notion de Black love est délicate en mon sens. Par contre, tant que nous le souhaiterons, nous continuerons à nous présenter dans toutes nos sphères, dans toutes nos potentialités.
Pouvez-vous nous raconter une anecdote de ce tournage ?
Nous avons tourné les images de Guadeloupe alors que le titre n’était pas encore terminé, c’est pour cela qu’il n’y a aucun playback dans ces scènes.
Imaginez un.e enfant de 10 ans qui regarde ce clip en 2100. Quels commentaires espérez-vous l'entendre faire ?
L’amour existe …
Quels sont vos futures projets sur le court/moyen/long terme ?
Je fourmille de projets mais j’aime en parler le moment venu pour ne pas m’éparpiller. Ce que je peux tout de même dire c’est que je travaille sur de nouvelles chansons, je continue de travailler sur ma marque de bijoux MOUN et puis j’ai une envie de me remettre derrière la caméra pour d’autres projets audio-visuels.
Bonus : pouvez-vous citer un clip-vidéo qui, pour vous, représente le mieux la Guadeloupe et nous expliquer pourquoi ?
Je dirais le clip de Sadik « On Sèl Kou » . Il y a quelque chose de crûment vrai dedans, je trouve qu’il décrit bien le caractère paradoxal de la Guadeloupe, il dénonce tout en étant tellement plein d’amour pour le pays et ses gens. J’aime ça.
Merci à Stevy Mahy d’avoir répondu à ces quelques questions. Vous pouvez la suivre sur Instagram @stevymahy. Pour mon analyse du clip-vidéo de “Tout Ce Que Tu Es”, cliquez ici.