Le Bouyon Gwada, Theodora, Perle Lama... Les leçons de media training de 2024 [5/5]
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Yé Moun La! J’espère que ce bilan musical 2024 vous a plus. Pour finir sur une note positive, en 2024, il y a eu des avancées pour le Zouk et nos musiques en général. Ce que je retiens sans classement particulier :
1) notre jazz célébré et récompensé notamment avec Grégory Privat, lauréat du prix Django Reinhardt [review Karukerament de son album “Phoenix”], Arnaud Dolmen, nommé aux Victoires du Jazz 2024, et Yoann Danier, qui a gagné le prix de la révélation avec son collectif Monsieur Mâlâ,
2) le lancement du Top Radio Outre-Mer Snep en juin 2024. C'est un bon début en termes de reconnaissance de nos besoins de structuration pour faire de l’analyse de données, mais c'est un outil inutile pour le moment. Non, je n'élaborerai pas dans la gratuité.
3) la comptabilisation des streams gratuits pour les certifications mise en place en juillet 2024. A voir comment ça se traduira pour nos artistes, car sans stratégie, encore une fois, c’est une fonctionnalité inutile. Non, je n’élaborerai pas dans la gratuité.
4) le disque d'or de Kalipsxau pour “Corps à Corps”. Un titre 100% Zouk réunionnais sorti en février 2021. Sans collaboration et sans machine de guerre médiatique, il est donc possible d'atteindre le disque d'or en France. Que cela prenne 3 semaines, 3 mois ou 3 ans ne retire en rien à cet accomplissement. Le défi pour elle et les artistes réunionnais sera de rester clairs sur leurs intentions et leurs objectifs. Qu'ils ne se fassent pas voler leur lumière car les vautours ont épuisé notre réserve d'artistes. La Réunion a un vivier de talents Zouk prêts à passer à l'étape supérieure. Prudence dans la sélection des collaborations…
5) Justement le plus bel exemple de collaboration réussie est le duo Nesly et MIKL. Ils ont fait leur premier Zénith de Paris en décembre 2024 et un album commun est prévu. On a besoin de Zouk inédit sur la vie des trentenaires. Que Lorenz reçoive l’inspiration d’explorer des sujets qui sortent de l’ordinaire comme avec “Sex Friends” (2012), “La Dernière Fois” (2021), “Nous Deux” (2021), “XO” (2024), “Je Serai Là” (2024).
6) Le challenge iTunes Kassav’ de Musicfeelings. Involontairement, il a fait une étude de géolocalisation des consommateurs de Zouk dans les communautés afro. L’intérêt n’est pas de regarder d’être numéro 1 d’un classement iTunes qui ne compte pas aux yeux de l’industrie. L’intérêt est de voir un public qui est capable d’acheter du Zouk et pour ça, il a fallu organiser ce public. C’est la vérification de la stratégie que j’avais énoncée en 2020 quand j’ai commencé à utiliser le #streamcaribbean. D’un point de vue Karukerament, les streams gratuits de Youtube et Soundcloud sont importants parce que l’analyse de ces données sont une première indication des marchés viables. Non, je n’élaborerai pas dans la gratuité. Quand nos artistes Zouk comprendront que ce public premier mérite d’être respecté et de vivre une expérience fan de qualité, là on pourra commencer à parler d’industrie.
Quand j’ai vu passer le tweet, j’ai cru avoir mal lu parce que ses mots n’avaient pas cette conviction dans le Space Twitter sans fin de mai 2023. Si les DJs semblent à nouveau convaincu que notre Zouk mérite d’être développé, peut-être que nous réussirons à mettre en place ce qu’il faut pour célébrer dignement les 50 ans du Zouk en 2029… Ou alors certains se serviront de la communauté pour ensuite pousser la musique afro faite par d’autres… Parce que Madonna a dansé sur “4 Kampé” de Joé Dwèt Filé, certains vont se mettre à faire du konpa et mettre du #gouyad partout, ce n’est pas ça qui développera une industrie. Peut-être qu’il serait temps d’arrêter d’écouter ceux qui tiennent toujours des discours défaitistes voire fatalistes et de (re)plonger dans l’innovation pour se construire une vraie vision positive par nous-mêmes et par nous-mêmes. Nous verrons dans 4 ans.
En tout cas, mon plus beau souvenir musical 2024 est le public amateur des musiques caribéennes. Je ne peux pas parler pour ce qui s’est passé en Guadeloupe/Martinique/Guyane, mais le public hexagonal de 2024 était un public de qualité en concerts et en festivals. Sur les réseaux sociaux, notre public a exercé sa fierté caribéenne à bon escient. En 2021, “personne” ne contestait la condescendance des médias (afro)hexagonaux qui étaient remerciés, ils étaient applaudis de parler de nous. En 2024, notre communauté virtuelle a désamorcé une polémique fabriquée de toute pièce. Certes, il y a encore un peu trop de likes et de remerciements à mon goût sur ces publications Instagram, mais il y a de plus en plus de commentaires qui recadrent respectueusement mais fermement. On reste concentré sur les vraies questions au lieu de se laisser distraire. Quel chemin parcouru dans l’expression de l’estime de nous-mêmes ! Et le plus beau, c’est que ça c’est fait de façon organique, sans concertation, sans leader qui fait voix d’autorité pour dire quoi faire. C’est pour ça que j’ai pris le temps de faire ce dossier.
Pour garder une trace pour nous le public premier, pour celles et ceux qui ne sont pas en ligne mais veulent comprendre les enjeux dans le soutien de certains artistes et/ou médias.
Pour nos artistes qui doivent avoir un regard critique mais bienveillant sur eux-mêmes, cultiver cette estime d’eux-mêmes pour refuser d’aller dans les espaces dévalorisants, s’affranchir des vautours dans leur entourage et vivre sans regret.
2021, 2023, 2024, on n’oubliera pas. Personne n’ira réécrire cette partie de l’histoire. Au vu de certaines déclarations et de certains business moves, les vautours s'affolent en coulisses. Continuons de les choquer en 2025.
#streamcaribbean #karukerament